vendredi 2 mai 2014

Chronique détaillée 4 : Le goût de l'immortalité de Catherine Dufour

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Genre littéraire : Science-fiction futuriste adulte
Date fin de lecture : 07/04/2013
Note : Coup de cœur - 19/20





Résumé (quatrième de couverture) :


Mandchourie, en l'an 2213 : la ville de Ha Rebin dresse des tours de huit kilomètres de haut dans un ciel jaune de pollution. Dans les caves grouille la multitude des damnés de la société, les suburbains. Une maladie qu'on croyait éradiquée réapparaît. Cmatic est chargé par une transnationale d'enquêter sur trois cas. Une adolescente étrange le conduira à travers l'enfer d'un monde déliquescent, vers ce qui pourrait être un rêve d'immortalité. Mais vaut-il la peine d'être immortel sur une Terre en perdition ?






Mon avis (de dix mètres de long) :

Il me semble tout d’abord important de préciser, que j’ai lu ce livre dans le cadre d’un défis lecture il y a environ un mois et que je ne lis que rarement de moi-même ce type de livre décrivant une humanité très sombre car, si je les aime beaucoup, ils me laissent toujours un arrière goût amer sur les Hommes (et puis ce genre littéraire ne supporte véritablement pas la médiocrité). De plus, le synopsie ne me donnait à la base pas du tout envie. Je suis toutefois plus qu’heureuse de ne pas mettre arrêté là et de l’avoir finalement lu.

L’histoire en elle-même est originale mais n’a rien d’exceptionnelle dans son déroulement qui, bien que surréaliste et futuriste (cela dépend des scènes), se veut des plus réaliste et actuel possible (il est d’ailleurs assez agaçant au début de ne rien comprendre sur les technologies, modes de vies, etc., du fait que rien concernant le monde futuriste dans lequel se passe l’histoire n’est d’écrit : l’héroïne parlant à un homme en faisant partie, elle n’a pas besoin de lui expliquer se qu’il connaît. Heureusement on fini par tout comprendre en voyant le quotidien des personnages).

Le livre commence donc par la présentation de l’héroïne qui se présente, au travers d’une très longues lettre (qui est en fait tout le roman), à un ami avec qui elle échange depuis un moment (on ne sait pas depuis combien de temps exactement). Celui-ci voulant la rencontrer, elle lui dit vouloir lui en apprendre plus sur elle et sa vie. Là, l’histoire se poursuit sous forme d’un récit raconté qui va nous présenter toute la vie du personnage principale (dont je ne me souviens pas avoir lu le prénom) et qui n’a finalement que peu de rebondissements, rien de véritablement extraordinaire, dans laquelle il est simple de se représenter, mais qui n’est pourtant pas commune. L’action se fait donc rare (voir quasiment inexistante dans la 1ère moitié du livre) mais les événements n’en sont pas moins forts et marquants. La vie de l’héroïne est également parsemée de longs récits racontant les vies des différents protagonistes de son histoire. Je ne peux par contre pas dire grand-chose concernant le contenu de l’histoire sans tout raconter du fait que le tout n’est en fin de compte pas très intense. Il en va de même pour le caractère des personnages qui, personnellement, m’ont pour la plupart des personnages laissés de marbre (sauf la mère qui m’a fait de la peine avec se fille assez ingrate) en se montrant extrêmement commun, ce qui, étrangement, n’a encore uns fois pas été un point négatif au livre mais au contraire une nouvelle manière de nous faire entrer dans son univers.

En effet, en prenant l’exemple de l’héroïne, j’ai eu l’impression que malgré la tournure de sa vie, elle n’est pas, comme l’on pourrait si attendre, avertie ou différente du commun des mortels mais au contraire « comme tout le monde ». Cela ne signifie, toutefois pas que je la considère comme quelqu’un de simple (et d’ailleurs pour moi personne ne l’ai), mais je la vois comme n’importe qui sur la volonté d’être immortel : elle prête à tout pour l’immortalité. Ce qui n’est non pas être simple mais refuser l’inévitable et comme elle le dit elle-même « ressentir la vie comme une drogue ». Ainsi, l’immense solitude du personnage ne m’a pas beaucoup marqué et j’ai plutôt retenue ce qu’elle est prête à faire pour acquérir une chose qu’elle critique et hait (c’est dure à expliquer comme sensation >.<). Car, finalement, tant pis si elle a tout perdue, elle s’accroche tout de même à son semblant de vie. Ainsi, bien que son ressenti sur Cmatic (le second personnage clé), soit ce qu’il soit (je vous laisse le découvrir pleinement), j’ai eu l’impression que finalement elle passait outre car, même s’il avait pour elle été se qui se rapproche le plus d’un ami/compagnon/etc, elle préférait vivre sans lui pour l’éternité car le goût de la vie était plus fort que tout (et ça même si elle sait n’avoir jamais réellement goûte à la vie). Ce qui est parallèlement étrange c’est qu’elle ne semble pas avoir peur de tout simplement s’arrêter. Je me demande donc pourquoi choisir de continuer dans ses conditions. L’espoir d’un jour pouvoir peut-être retrouver un corps normal me parait bien mince face à tout ça. Aussi, comme l’a dit une autre internaute, j’en suis moi arrivée à l’impression « qu’elle a acquis au fil du temps une déshumanisation telle, qu’elle en est arrivée à vouloir pactiser avec son interlocuteur pour la cultiver, encore et encore, même à un prix aussi abominable soit-il. » J’en reviens donc à mon idée d’être « comme tout le monde » car lorsqu’on lit son récit on se rend compte, qu’outre de rares exceptions, tous auraient et feraient sans doute les mêmes choix qu’elle pour gagner et conserver cette immortalité qui à de quoi repousser.

En ce qui concerne le monde, je n’ai pas grand-chose à en dire car si on n’est dès le début encré dedans, on ne s’y arrête jamais. Je vais donc citer une internaute ayant bien résumé l’univers : « Souvenirs et émotions d’une vie sur une Terre où tout s’est tari sauf la misère et l’élitisme, où le ciel est devenu jaune et irrespirable de pollution, où tout est géré par l’informatique, et où la majuscule n’est permise que pour les choses très importantes ou rares et doit se mériter.

Une histoire entre les tours et les sous-sols, les sociétés et les clans, les alliances et les querelles, la famille et les voisins. » Le monde en lui même est donc assez recherché (j’ai beaucoup aimé les tours, la suburb…) mais je trouve que beaucoup d’auteurs de SF post-apocalyptique, dystopie ou simplement futuriste-désillusionnée en font de même alors que si peu parviennent à nous faire ressentir l’histoire de cette manière… Voilà pourquoi cet aspect du livre ne m’a pas plus marqué.






Pour ce qui est du but de l’histoire, j’ai pendant une grande partie du récit cherché la finalité du roman que j’ai finalement pleinement comprise à la page 311/318, en voyant où l’auteur voulez en venir par sa vision des conséquences de la recherche d’immortalité (j’ai d’ailleurs beaucoup apprécié la relation sagesse et vieillesse différente de la vision traditionnelle). Et concernant les passages pouvant choquer (car il y en a pleins), je ne suis pas souvent dérangé par ce que je lis (ça ne met arrivé qu’une fois lors d’une lecture de scène de torture) et n’es donc pas non plus ici été déranger par l’atmosphère de livre et les événements que l’ont suit et qui sont toutefois tous plus glauques les uns que les autres. Ils m’ont en revanche bien fait réfléchir et adoré mon époque ! La fin m’a également beaucoup plus car colle à merveille avec le reste ! Loin d’être cucul ou à l’eau de rose, elle montre, avec la proposition de l’héroïne à son interlocuteur, que tout le monde est pareil, que rien de change et achève parfaitement le récit sur une touche ouverte et dans le même climat…

Enfin, en ce qui concerne le style d’écriture, en plus d’être presque soutenu (mais pas du tout pompeux), ce récit est écrit sur un ton plat et morne allant à merveille au personnage qui l’est tout autant. Et il est fou de constater qu’on jurerait lire le bulletin météo et non pas un avenir des plus horrible !! Cela n’est toutefois absolument pas un point négatif puisqu’il nous permet d’entrer dans l’univers de cette femme me faisant penser au symbolique du gris sur absolument tous les points. J’ajouterais même que c’est l’un des choses que j’ai particulièrement aimé dans ce livre : l’art de nous rendre commun, quotidien et normal invraisemblable !

En conclusion, j’ai énormément aimé ce livre (que j’ai néanmoins mis un temps fou à lire et pour lequel je n’ai compris mon attachement que suite à une discussion dans laquelle j’exposais mon point de vue le concernant) et le conseille donc à tous ceux aimant mes romans nous faisant réfléchir sur notre mon monde et nos buts (bien plus que ceux aimant la SF car on ne la ressent pas vraiment). Et, au contraire, je le déconseille toutefois à tous ceux pouvant être déranger par les histoires montrant les côtés sombres de l’homme ou à ceux ayant besoin d’actions (car même lorsqu’il y en a, celles-ci sont faites de manières inactives). De plus, il sera sûrement dur d'accès pour les lecteurs n'ayant pas l'habitude de lire des romans adultes et à l'écriture assez soutenue.


Note : Coup de cœur - 19/20


Quelques citations (il y en a beaucoup, ce qui ne sera pas souvent le cas, mais je n’ai pas pus trancher) :

• A son interlocuteur de manière générale : « La souffrance n’élève pas, elle abaisse. Elle ne rend pas intelligent, elle abrutit ; elle ne rend pas plus fort, elle fêle ; elle n’éclaircit pas la vue, elle crève les yeux; elle ne mûrit pas l’esprit, elle le blettit. »
• A son interlocuteur en parlant d’une rencontre : « Vouloir n’est pas donné à tout le monde. Il faut naître avec des yeux qui voient clair, un cerveau qui décide vite et des bras assez puissants pour agir. Par là-dessus, il faut suffisamment de talent pour que ce que vous voulez, que ce soit une femme, une amitié ou une science, veuille aussi de vous. Et il faut encore la dose suffisante d’orgueil pour estimer que cette science, cette amitié ou cette femme vaut la peine qu’on se donne puisqu’elle est choisir par vous. L’ensemble de ces qualités fait de Shi une espèce peu commune. Vous comprenez maintenant pourquoi je n’ai pas donné à cet homme le rôle principal de mon histoire : trop de perfection fatigue. Le souvenir de Shi a toujours été pour moi un bon remède contre la tentation du suicide ou du meurtre de masse. On peut estimer que l’humanité n’a pas tout raté, puisqu’elle réussit de temps en temps des créatures comme lui".
• A son interlocuteur de manière générale : « Pardonnez-moi, mais je ne crois pas à cette sagesse des anciens pour laquelle vous avez tant de respect. Car les vieillards sont ceux qui ont beaucoup vécu et donc beaucoup souffert. Je suis morte et j’ai tué, j’ai vu tuer et mourir, j’ai eu un temps immense pour la douleur et la méditation, ai-je pour autant grandi en force morale? En discernement? La souffrance n’élève pas, elle abaisse. Elle ne rend pas intelligent, elle abrutit ; elle ne rend pas plus fort, elle fêle ; elle n’éclaircit pas la vue, elle crève les yeux ; elle ne mûrit pas l’esprit, elle le blettit. »
• A son interlocuteur de manière générale : « Le plus ennuyeux, en matière politique, est que chacun des participants croit qu’il est le seul à avoir lu sun tsu et machiavel. Résultat, vous y croisez cent mille connards qui nomment "tactique" leur sauvagerie, "influence" le goût des autres pour leur argent, "efficacité" leur absence de vue à long terme, "réalisme" leur manque de convictions et "victoire" les bourdes du camp d’en face. »
• A personne et à tous : « On ne se méfie jamais assez des gens qui vous aiment. »
• A son interlocuteur de manière générale : « D’accord, apprendre les règles est important pour évoluer en ce monde, encore faut-il aussi enseigner l’envie d’y vivre. »
• A elle-même : « Comme d’habitude, c’était l’aube et elle était moche. »
• A son interlocuteur : « est une réponse à votre requête en deux mots : vous voulez me voir en vrai. Cette expression me fait rire. Nous passons tant de temps dans les décors virtuels à piloter nos avatars, que la réalité matérielle n’est plus qu’un point étroit entre deux 3d. »
• A personne et à tous : « Montre moi le visage de ton Dieu, je connaitrai celui de ton monde »
• En parlant d’une de ses rencontres : « Peut être y a-t-il encore des bouts de vrai ciel jaune au-dessus de sa rue ? Et qu’elle lèvre de temps en temps les yeux vers eux. »
• En parlant de sa mère : « Aurais-je fais plus ? J’aurais fais pire si je l’avais pus. »
• En parlant d’une de ses rencontres : « vous aurez compris que j’ai tenu à lui plus que je le dis. Mais il est mort bêtement et ce n’est pas une chose qu’on pardonne à quelqu’un dont on avait besoin pour vivre. »
• En parlant d’une de  ses rencontres : « Il était impossible de changer son goût pour ce qu’elle appelait la liberté et qui consistait à errer dans les coursives en écoutant le claquement joyeux de la plante de ses pieds nues sur le sol… »


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